Point à l'horizon comme toujours

Publié le par L'Oeil regardait cahin-caha

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Sur le chemin de ses errances, elle s’arrêta attirée par le soudain grésillement de grillons. ça n’était pas possible, qu’elle n’ait jamais remarqué cette oliveraie auparavant. Elle pensait être passée maintes fois par ici. Un souffle d’air chaud lui passa dans les cheveux. Ceux-ci flottaient, noirs, drapeau à tête de mort annonciateur d’une flibuste. Son visage retrouva le léger sourire en coin au détour de la septième rangée, et du troisième olivier. Il était là.

Elle ne le voyait pas mais elle le sentait. Point à l’horizon comme toujours. Elle le savait.
Elle revoyait la nuit où il était arrivé alors qu’elle n’attendait plus rien d’autre que le vide. Sidérale comme toujours. La nuit où le poing collant d’émotion et de peur elle avait enfin ouvert sa main à elle. Dans ses mains à lui. Comment elle avait bravé sa terreur de voir la soucoupe atterrir ainsi, flottante au-dessus des jasmins en fleurs. Elle l’avait attendu, mais sans y croire. Contre toute attente, celle de toute une vie, elle était heureuse d’être seule alors en cet incroyable moment. Sans parler il lui dit tout. Elle écouta en silence, happée d’un désir inconnu et foudroyant. Quel drôle de coup: tomber ainsi sous le charme d’un indescriptible extra-terrestre. Personne ne la croirait jamais. « Tant mieux? » se dit-elle. « Personne ne m’a jamais crue. » Elle savait juste qu’il était grand, doux et que ses yeux parlaient. Qu’il lui avait révélé qui elle était; ce qu’elle avait toujours voulu entendre. Qu’elle l’en aimait d’autant plus, peu importe d’où qu’il vienne. Ce sourire qu’elle avait eu jadis, celui de la pirate encanaillée, lui revint là, sous les olives. Peut-être parce qu’elle crut voir dans celles-ci comme le motif des étoiles de ce soir-là. Ou un peu de l’incroyable iris changeant de son regard.

Le bourdonnement des grillons se dissipa comme l’amant d’un soir qu’elle ne revit jamais; du moins sur cette terre. Les pieds empêtrés dans les ronces, elle sortit de son souvenir et reprit sa route.
« Même pas mal » ironisa-t-elle.
Les grillons, oracles farceurs, eux aussi, s’étaient tus. Reviendrait-il un jour, ne serait-ce qu’en souvenir?

FIN

Publié dans Contes

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